Le S?n?gal et la chaleur de l?Afrique


S?n?gal - Rosso - 7/10/2004

Apres l'anglais en Asie et l'espagnol en Am?rique du Sud, en Afrique, c'est le fran?ais qui prime, question d'histoire. Nous y arriv?mes au milieu de la nuit apr?s un voyage en avion interminable : Rio-Sao Paulo-Londres-Paris CDG-Paris Orly-Casablanca-Dakar, 36 heures et pas moins de 4 avions, merci "Connaisseurs du voyage" !! Nous entamons notre 5?me et dernier continent. On est d?sormais sur le chemin du retour : direction Paris.

Notre journ?e d'introduction

A Dakar, nous ?tions attendus. Monsieur le Maire de Grand Dakar (un arrondissement de Dakar), Lamin Samake, un parent de la famille de Marie (copine de Chacha) est venu nous chercher ? l'a?roport, ? 4 heures du matin ; et nous a gracieusement h?berg?s pendant une semaine dans un petit appartement ? 2 pas de la mairie. Le lendemain de notre arriv?e s'organisait la Journ?e de la Femme, une grande f?te de quartier. C'est tout naturellement que nous avons ouvert le d?fil?, ? v?lo, accompagn?s par une dizaine d'enfants du coin. Un excellent moyen de nous faire conna?tre ! Apr?s, forc?ment, on ?tait un peu chez nous l?-bas, serrant 10 mains d?s qu'on sortait de la maison. Install?s ? la tribune d'honneur, nous avons ensuite assist? ? la mont?e des couleurs (avec d?fil? militaire, marseillaise et tout et tout) et au reste des festivit?s organis?es par les habitants de Grand Dakar.
Nous y rencontrons l'Attach? de D?fense de l'ambassade de France qui nous introduira dans le petit monde des coop?rants (militaires fran?ais vivant au S?n?gal pour aider ? former et ? structurer l'arm?e s?n?galaise). Ce sera l'occasion d'un excellent repas dans sa superbe maison coloniale et de point de chute confortable sur le trajet.
Bref, au terme de cette journ?e on conna?tra plein de monde, et en Afrique, c'est important, voire primordial !


Le Toubab et le S?n?galais

Outre le fait de nous sentir chez nous, avec nos petites habitudes chez "le Coq" (le boui-boui du coin) et les voisins ? qui on va dire bonjour, notre "journ?e d'introduction" nous a ?vit? certains d?sagr?ments du touriste ? Dakar. "Toubab" en wolof (langue du pays avec le fran?ais) signifie "Blanc". Et dans l'inconscient populaire ?a veut dire "gros plein de thunes". Les joyeux "bye bye" remplis de sourire qu'on a trouv?s partout sur les routes du monde sont ici remplac?s par de tristes "donne moi argent", "donne moi cadeau", "donne moi v?lo"...
Au moins dans notre quartier ? Dakar, on y ?chappait. Mais sur la route... On est litt?ralement assailli par des groupes d'enfants qui parlent ? peine fran?ais, ne sachant que demander des cadeaux ou de l'argent. Ce sont des "talib?s". Jeunes envoy?s par leurs parents ? l'?cole coranique et qui ob?issent ? leur marabout (qui leur enseigne le Coran et la lecture). Et ils sont d'ailleurs oblig?s de lui ramener tout ce qu'ils r?coltent... Alors certes les S?n?galais sont pauvres, mais pas plus que les petits N?palais ou les petits Laotiens que nous avions tant appr?ci?s. C'est insupportable et tr?s dommage pour le pays. Car nous avons aussi rencontr? des gens extraordinaires et d?sint?ress?s, qui nous ont fait d?couvrir la culture tranquille de l'Afrique.


Le S?n?gal, c'est cooool

Nous n'avons pas la m?me notion du temps que les Africains. D'abord parce qu'ils n'ont pas de montre, et ensuite parce que c'est pas pareil, tout simplement. Ils le disent eux-m?mes : "Vous les Blancs, vous avez l?heure mais vous n?avez pas le temps". Nous, les Africains, nous n?avons pas l?heure mais nous avons le temps. Djibi doit passer nous prendre ? 13h, il est l? ?16h. 13h, ?a veut dire le premier rdv de l'apr?s-midi. 11h le deuxi?me de la matin?e, alors forc?ment, si le premier a dur? un peu...
Prendre le th? apr?s manger n?cessite d'avoir son apr?s-midi. Il y en a 3 : le premier pour la mort, amer et tr?s sucr?, le second pour l'amour, plus doux et avec un petit go?t de menthe, et le troisi?me pour l'eau, une pointe de sucre vanill? en plus. L'important dans le th?, c'est la mousse. Une belle ?paisseur de mousse qui recouvre les 3cm de liquide fonc?, et qui s'obtient en transvasant de verre en verre, sachant que plus on verse de haut, plus ?a fait de mousse. Compter une bonne heure, si le pr?pos? au th? est un rapide.
Dire bonjour au S?n?gal c'est r?p?ter quarante fois "?a va ?" en alternant la famille, les affaires, la sant?, le pays, la famille, les affaires... Quitte ? ce que l'?change s'arr?te l? et que chacun continue ensuite sa route apr?s 5 minutes de "?a va". Tr?s marrant, mais si tu rencontres 5 personnes sur ton chemin, forc?ment tu seras en retard ? ton rendez-vous de 13h, heureusement ?a n'a aucune importance ! J'adore...
Si quelqu'un te dit "c'est s?r", alors peut-?tre, si dieu le veut, "inch?Allah"... On comprend la difficult? dans de telles conditions d'organiser, de structurer ce pays, et de le diriger ? la mani?re occidentale. Mais ses habitants le d?sirent-ils ?


Sur la route, la chaleur et "le p?ril acridien"

Notre trajet au S?n?gal est exclusivement sur de la bonne route goudronn?e, ? peine vallonn?e, avec un petit vent juste de quoi te donner l'impression que tu vas vite, et il fait beau. Donc toutes les bonnes conditions sont r?unies. Toute sauf une, il fait une chaleur ? crever. On arrive comme des ?nes ? une des p?riodes les plus chaudes de l'ann?e. Il faut toujours qu'on se retrouve dans des endroits avec des climats pas possibles. Et avec le Sahara c'est pas fini !! Il est quasi impossible de p?daler entre midi et deux sous peine de cuisson radicale. M?me ? l'ombre, immobile, buvant des litres d'eau, on se liqu?fie ; et malgr? mes efforts incessants je ne parviens pas garder ma belle chemise propre...
Le 2?me fait marquant de la route s?n?galaise sera ce que le pr?sident lui-m?me nomme "le p?ril acridien" (avec l'accent c'est terrible), autrement dit : les criquets. Nous les rencontrons en fin de journ?e. On voit une lueur ros?tre au loin dans le ciel. Puis on croise quelques voitures ? la calandre couverte de gros machins roses et on p?n?tre enfin dans le nuage. C'est dense mais ?a n'emp?che pas de rouler. Le soir, ils se posent. Les arbres verts deviennent roses, puis couleur d'?corces, morts... Le lendemain ils red?marrent, nous aussi. On ne sortira du nuage que 12 kilom?tres plus loin, c'est gigantesque !! Les paysans parcourent leurs champs en tapant sur des casseroles, moyens d?risoires face ? l'ampleur du d?sastre.


Passage de fronti?re ? p?age : l'entube Toubab

Apres Dakar : Saint Louis, et 100 bornes plus loin, la fronti?re mauritanienne ? Rosso. Nous avons entendu beaucoup de mal de cette fronti?re, tout le monde s'y est fait extorquer des sommes d'argent cons?quentes, parfois hallucinantes. Plus de 100 euros par t?te dans certain cas. Au moins nous ?tions pr?venus et sur nos gardes.
Premier p?age : la sortie de Saint Louis. Contr?le de douane :
"papier du v?hicule"
"c'est un v?lo... ?"
"carte grise"
"c'est toujours un v?lo !!"
"passeport"
Et pourquoi il veut pas nous les rendre le monsieur ?
"Donnez 3000 chacun et c'est bon"
OK, le ton est donne. A titre indicatif, au S?n?gal un maf?-viande (plat typique) co?te 300 CFA sur la route (100CFA = 1 FF = 0.15 euro). Un quart d'heure de palabre, souriant mais ferme comme d'hab et utilisant tous les arguments dont on dispose, du plus r?el au plus foireux (grand voyage, pas de moteur, un ami est passe l? il n'a rien pay?, on conna?t le maire de Grand Dakar, ...). On arrive ? un "allez, donnez quelque chose et c'est bon", 5 minutes de plus et on passe sans rien laisser.
On arrive ? Rosso. Les formalit?s sont les m?mes ? chacun de nos passages de fronti?re, tamponner les passeports, changer un peu de sous, et re-passeport de l'autre cote.
Au poste s?n?galais, le type nous rend 2 passeports, le troisi?me... ? Il faut donner 3000 pour les heures suppl?mentaires. Comprenez, ? midi ?a ferme, et comme il a mis une plombe ? trouver son tampon, il est midi cinq... Palabre, ?a passe. Changer de l'argent, attention au faux billets, conna?tre le taux r?el (merci le net) pour ne pas perdre trop d'argent. En route pour le bac, il y a un fleuve ? traverser. 15 "piroguiers" veulent nous faire passer de l'autre c?t?, 3000 par personne. Le bac est en face, on nous dit que c'est 2000 par personne, qu'il faut l'attendre plus de 2 heures en plein cagnard. Heureusement un vieux type sympa qui suit nos p?r?grinations depuis une heure me tire par la manche et me dit discr?tement "attendez le bac", et il s'en va, il ne veut pas avoir de probl?me avec les piroguiers.
30 minutes plus tard le bac est l?. Le vrai prix, c'est 300... Mais c'est un bac sp?cial !! On a pas le droit de monter dedans... Vu la rapidit?, le suivant ne sera pas l? avant plusieurs heures. On file 1000 (au lieu des 2000 demand?s) au policier du port et on monte. Fini pour le c?t? s?n?galais.
Tamponnage de passeport, visa en r?gle, change au march? noir ? un taux beaucoup plus int?ressant que le r?el, les billets sont vrais. C'est trop facile, o? est l'arnaque ? On va pour sortir de l'enceinte du port, il y a une grille.
"Donnez moi les tickets du bac". Ah bon il y a des tickets pour le bac, c'est nouveau, pas vu ?
"Donne 3000 et tu peux sortir".
Ils commencent ? nous gonfler s?rieusement avec leur 3000 !! Heureusement les types du change avec qui on a sympathis? viennent nous aider et on sort sans rien payer.
Un type nous rattrape : "Vous avez les papiers pour le change"
"???"
"Il faut un papier si vous ?tes contr?l?s par la douane pour justifier que vous avez chang? et que vous ?tes pas des contrebandiers, je peux t'en faire un, pas de probl?me, viens avec moi, dans l'arri?re-boutique"
"Non, toi tu viens ici avec ton papier"
Il remplit les papiers, nous les donne : "?a fait 6000 par papier"
"!!!!! Tu peux les garder tes papiers"
"si la douane te choppe, ?a sera 10% de ce que tu as chang?"
Comment savoir la v?rit? ? Les guides semblent dire que la monnaie est tr?s contr?l?e. 6000 c'est ?norme, on tombe a 3500, ?a reste beaucoup. Un type dit qu'on en a pas besoin, le type des papiers nous revient pas, on se casse vite fait sans ses papiers. En 200 km, on a d?j? eu 6 contr?les de douane et on nous a jamais rien demand?...
Au final on s'en tire bien, mais on a mis des plombes ? passer cette fronti?re.

Le S?n?gal nous laisse une impression mitig?e. De tr?s bonnes choses : toujours ces rencontres, la d?couverte de cette vie ? l'africaine ; mais aussi le comportement insupportable de ces enfants (et de nombreux adultes) qui inqui?te pour l'avenir. Et qui laisse un sentiment de relation biais?e par le fric, qui te rend m?fiant d?s qu'on t'aborde.
Maintenant il ne nous reste plus qu'un petit d?sert ? traverser, une petite cha?ne de montagne, et c'est le retour au pays du Picon-bi?re, le seul au monde, aussi incroyable que ?a puisse para?tre.

Fred pour les 3 V?los



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